Grâceà l'. Ô le bruit de la pluie! Il pleure sans raison Ban thai spa trocadero paris paris week end romantique rencontre amicale 82. Guide des meilleurs massages à Poissy. Sous la pluie. Poème "La pluie" - recueil "Stances et poèmes" J'entends la pluie, qui clapote en jouant ses belles notes plic plac plac. La pluie qui rythme le poème faisait le bonheur des
La mort n'est rien. Je suis seulement passée dans la pièce à côté. Je suis moi, tu es toi. Ce que nous étions l'un pour l'autre, nous le sommes toujours. Donnes moi le nom que tu m'as toujours donné, Parles moi comme tu l'as toujours fait, n'emploies pas un ton différent ne prends pas un air solennel ou triste. Continue à rire de ce qui nous faisait rire ensemble. Prie, souris, penses à moi, prie pour moi. Que mon nom soit prononcé à la maison comme il l'a toujours été, sans emphase d'aucune sorte, sans une trace d'ombre. La vie signifie ce qu'elle a toujours signifié. Elle est ce qui a toujours été. Le fil n'est pas coupé. Pourquoi serais hors de ta pensée parce que je suis hors de ta vie? Je t'attends. Je ne suis pas loin, juste de l'autre côté du chemin. Tu vois, tout es bien...

Ilrestera de toi ce que tu as offert Entre les bras ouverts un matin au soleil. Il restera de toi ce que tu as perdu Que tu as attendu plus loin que les réveils, Ce que tu as souffert, en d’autres revivra. Celui qui perd sa vie, un

Il restera de toi Simone Veil Il restera de toi…Il restera de toi...ce que tu as lieu de le garder dans des coffres restera de toi de ton [size=13]jardin secret,Une fleur oubliée qui ne s'est pas que tu as donnéEn d'autres qui perd sa vieUn jour la trouvera.[/size] Il restera de toi ce que tu as offertEntre les bras ouverts un matin au restera de toi ce que tu as perduQue tu as attendu plus loin que les réveils,Ce que tu as souffertEn d'autres qui perd sa vieUn jour la trouvera. Il restera de toi une larme tombée,Un [size=13]sourire germé sur les yeux de ton restera de toi ce que tu as seméQue tu as partagé aux mendiants du que tu as seméEn d'autres qui perd sa vieUn jour la trouvera.[/size]Simone Veil Ninnenne

Ilrestera de toi Ce que tu as donné Au lieu de le garder Dans des coffres rouillés Il restera de toi De ton jardin secret Une fleur oubliée Qui ne s'est pas fanée Ce que tu as donné En d'autres fleurira Celui qui perd sa vie Un jour la trouvera. Il restera de toi Ce que tu as chanté A celui qui passait Sur son chemin désert Il restera

Paroles de la chanson Il Restera De Toi par Chansons de messe d'enterrement 1 - Il restera de toi Ce que tu as donné Au lieu de le garder Dans des coffres rouillés Il restera de toi De ton jardin secret Une fleur oubliée Qui ne s'est pas fanée Ce que tu as donné En d'autres fleurira Celui qui perd sa vie Un jour la trouvera 2 - Il restera de toi Ce que tu as chanté A celui qui passait Sur son chemin désert Il restera de toi Une brise du soir Un refrain dans le noir Jusqu'au bout de l'hiver Ce que tu as chanté En d'autres jaillira Celui qui perd sa vie Un jour la trouvera 3 - Il restera de toi Ce que tu as offert Entre tes bras ouverts Un matin de soleil Il restera de toi Ce que tu as perdu Que tu as attendu Plus loin que tes réveils Ce que tu as offert En d'autres revivra Celui qui perd sa vie Un jour la trouvera 4 - Il restera de toi Une larme tombée Un sourire germé Sur les yeux de ton cœur Il restera de toi Ce que tu as semé Que tu as partagé Aux mendiants du bonheur Ce que tu as semé En d'autres germera Celui qui perd sa vie Un jour la trouvera centrodi ascolto psicologico milano. Yoga, Meditation, Consultation, Relationship Education, & Psychotherapy 10 poèmes à lire pour l’enterrement, les obsèques, les funérailles d’un proche 1. L’arbre et la graine Quelqu’un meurt et c’est comme des pas qui s’arrêtent …. Mais si c’était un départ pour un nouveau voyage ? Quelqu’un meurt et c’est comme une porte qui claque … Mais si c’était un passage s’ouvrant sur d’autres paysages ? Quelqu’un meurt et c’est comme un arbre qui tombe … Mais si c’était une graine germant dans une terre nouvelle ? Quelqu’un meurt et c’est comme un silence qui hurle …. Mais s’il nous aidait à entendre la fragile musique de la vie ? Benoît Marchon Et un sourire La nuit n’est jamais complète Il y a toujours Puisque je le dis Puisque je l’affirme Au bout du chagrin Une fenêtre ouverte Une fenêtre éclairée Il y a toujours Un rêve qui veille Désir à combler Faim à satisfaire Un coeur généreux Une main tendue Une main ouverte Des yeux attentifs Une vie La vie à se partager. Paul Eluard 3. Demain, dès l’aube Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends. J’irai par la forêt, j’irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées, Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit, Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées, Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit. Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe, Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur, Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur. Victor Hugo 4. Sans titre Vous pouvez verser des larmes parce qu’elle s’en est allée, ou vous pouvez sourire parce qu’elle a vécu. Vous pouvez fermer vos yeux et prier qu’elle revienne, ou vous pouvez ouvrir vos yeux et voir tout ce qu’elle nous a laissé. Votre coeur peut être vide parce que vous ne pouvez la voir, ou il peut être plein de l’amour que vous avez partagé. Vous pouvez tourner le dos à demain et vivre hier, ou vous pouvez être heureux demain parce qu’il y a eu hier. Vous pouvez vous souvenir d’elle et ne penser qu’à son départ, ou vous pouvez chérir sa mémoire et la laisser vivre. Vous pouvez pleurer et vous fermer, ignorer et tourner le dos, ou vous pouvez faire ce qu’elle aurait voulu Sourire, ouvrir les yeux, aimer et continuer Eileen Cicole 5. Devant ma tombe Ne reste pas à pleurer devant ma tombe, Je n’y suis pas, je n’y dors pas. Je suis un millier de vents qui soufflent ; Je suis le scintillement du diamant sur la neige. Je suis la lumière du soleil sur le grain mûr ; Je suis la douce pluie d’automne. Quand tu t’éveilles dans le calme du matin, Je suis le prompt essor Qui lance vers le ciel où ils tournoient les oiseaux silencieux. Je suis la douce étoile qui brille la nuit. Ne reste pas à te lamenter devant ma tombe. Je n’y suis pas ; je ne suis pas mort. Anonyme 6. Il restera de toi Il restera de toi ce que tu as donné Au lieu de le garder dans des coffres rouillés… Ce que tu as donné en d’autres fleurira… Il restera de toi ce que tu as offert Entre tes bras ouverts un matin au soleil… Ce que tu as offert en d’autres revivra… Il restera de toi un sourire épanoui Aux bords de tes lèvres comme au bord de ton cœur… Ce que tu as ouvert en d’autres grandira… Il restera de toi ce que tu as semé Que tu as partagé aux mendiants du bonheur… Ce que tu as semé en d’autres germera… Simone Veil 7. L’échelle des anges Je ne sais pas d’où je viens mais je sais que j’ai toujours été ici. Je ne sais pas qui je suis mais je sais que ce que je suis est ce que l’autre est. Je ne sais pas où je suis, mais je sais que ce lieu n’a pas de limites. Je ne sais pas où je vais, mais je sais qu’à toutes heures quelqu’un m’accompagne. Je ne sais pas quel est mon but, mais je sais que pour le connaître, je dois arriver à moi-même. Je ne sais pas ce que je cherche, mais je sais que ce que je cherche me cherche. Je ne sais pas ce que je peux recevoir, mais je sais remercier pour ce qu’on m’a donné. Alexandro Jodorowsky 8. Au bord du vide Nous voici aujourd’hui au bord du vide Puisque nous cherchons partout le visage que nous avons perdu. Il était notre avenir et nous avons perdu notre avenir. Il était des nôtres et nous avons perdu cette part de nous-mêmes. Il nous questionnait et nous avons perdu sa question. Nous voici seuls, nos lèvres serrées sur nos pourquoi. Nous sommes venus ici chercher, chercher quelque chose ou quelqu’un. Chercher cet amour plus fort que la mort. Paul Éluard 9. Sans titre Un être humain qui s’éteint, ce n’est pas un mortel qui finit. C’est un immortel qui commence. C’est pourquoi en allant confier où il dormira doucement à côté des siens, en attendant que j’aille l’y rejoindre, je ne lui dis pas adieu, je lui dis à bientôt. Car la douleur qui me serre le cœur raffermit, à chacun de ses battements, ma certitude qu’il est impossible d’autant aimer un être et de le perdre pour toujours. Ceux que nous avons aimés et que nous avons perdus ne sont plus où ils étaient, mais ils sont toujours et partout où nous sommes. Cela s’appelle d’un beau mot plein de poésie et de tendresse le souvenir. Doris Lussier 10. Ton souvenir est comme un livre Ton Souvenir est comme un livre bien aimé, Qu’on lit sans cesse, et qui jamais n’est refermé, Un livre où l »on vit mieux sa vie, et qui vous hante D’un rêve nostalgique, où l »âme se tourmente. Je voudrais, convoitant l »impossible en mes voeux, Enfermer dans un vers l’odeur de tes cheveux ; Ciseler avec l’art patient des orfèvres Une phrase infléchie au contour de tes lèvres ; Emprisonner ce trouble et ces ondes d’émoi Qu’en tombant de ton âme, un mot propage en moi ; Dire quelle mer chante en vagues d’élégie Au golfe de tes seins où je me réfugie ; Dire, oh surtout ! tes yeux doux et tièdes parfois Comme une après-midi d’automne dans les bois ; De l’heure la plus chère enchâsser la relique, Et, sur le piano, tel soir mélancolique, Ressusciter l’écho presque religieux D’un ancien baiser attardé sur tes yeux. Albert Samain Pour aller plus loin Si vous souhaitez allez plus loin n’hésitez pas à consulter ma chaîne youtube en cliquant ici Si vous souhaitez lire d’autres articles a propos des cérémonies d’hommages, des rituels, … cliquez-ici
IlRestera De Toi - Simone Veil. Il restera de toi Il restera de toi ce que tu as donné. Au lieu de le garder dans des coffres rouillés. Il restera de toi de ton jardin secret, Une fleur
Table des matièresLa rencontre du Christ Unir mystique et politique Refus de l’institution ecclésiale Contemplation acquise et passive Engagement dans la résistance Exil aux Etats-Unis Le sens d'une mort désirée Cette disposition de l’homme à dominer autant qu’il peut, Simone Weil l’appelle la pesanteur, en raison de son universelle attraction. Rien n’échappe à ce désir de domination. C’est comme les poules qui se précipitent à coups de bec sur une poule blessée ». Pour éviter cette cruauté naturelle, individuelle ou collective, il faudrait renoncer à dominer là même où on en a le pouvoir retenir en soi l’appétit de puissance. Mais puisque la loi de la pesanteur est universelle, une telle retenue relève du miracle. Lucide, Simone Weil lit les effets de cette pesanteur dans son propre comportement dans ses crises de migraine de plus en plus fréquentes et violentes, elle ressent le besoin d’infliger sa pesanteur à autrui. Celui qui souffre ne se tient plus en lui-même ; il voudrait faire du mal pour combler ce vide en soi en le créant chez autrui ». La grâce, pour elle, serait de supporter le vide créé par la douleur et de renoncer ainsi à la force. Mais comment se délivre-t-on de ce qui est comme la pesanteur ? » Elle trouvera une partie de la réponse dans ce que l’on peut appeler son expérience mystique. Simone Weil avait été élevée dans l'agnosticisme, voire l'athéisme le plus total. Ce n'est pas au sein d'une tradition religieuse qu’elle rencontrera le divin, elle qui déclare n’avoir jamais, à aucun moment, cherché Dieu ». Elle n'affirmait ni ne niait, estimant qu'étant en ce monde, notre affaire était d'adopter la meilleure attitude à l'égard des problèmes de ce monde et que cette attitude ne dépendait pas de la solution du problème de Dieu » Attente de Dieu AD, pp. 70-7l. C’est ainsi qu'elle rencontra le christianisme… et plus directement le Christ. Immédiatement après son année d’usine, lors d’un voyage avec ses parents au Portugal, en 1934, elle vit une première expérience forte – Dieu sensible au cœur » – lui faisant découvrir le christianisme comme la religion des esclaves » Étant dans cet état d’esprit, et dans un état physique misérable, je suis entrée dans ce petit village portugais, qui était, hélas, très misérable aussi, seule, le soir, sous la pleine lune, le jour même de la fête patronale. C’était au bord de la mer. Les femmes des pêcheurs faisaient le tour des barques, en procession, portant des cierges, et chantaient des cantiques certainement très anciens, d’une tristesse déchirante. Rien ne peut en donner une idée. Je n’ai jamais rien entendu de si poignant, sinon le chant des haleurs de la Volga. Là j'ai eu soudain la certitude que le christianisme est par excellence la religion des esclaves, que des esclaves ne peuvent pas ne pas y adhérer, et moi parmi les autres AD, p. 75. En 1937, Simone Weil séjourna deux jours à Assise J’ai passé à Assise deux jours merveilleux. Là, étant seule dans la petite chapelle romane du XIIe siècle de Santa Maria degli Angeli, incomparable merveille de pureté, où saint François a prié bien souvent, quelque chose de plus fort que moi m'a obligée, pour la première fois de ma vie, à me mettre à genoux. » AD, p. 75. C’est dans ce même étonnement qu’elle rencontre le Christ humble et pauvre, à l’âge de 29 ans En 1938, j'ai passé dix jours à Solesmes, du dimanche des Rameaux au mardi de Pâques, en suivant tous les offices. J'avais des maux de tête intenses ; chaque son me faisait mal comme un coup ; et un extrême effort d'attention me permettait de sortir hors de cette misérable chair, de la laisser souffrir seule, tassée dans son coin, et de trouver une joie pure et parfaite dans la beauté inouïe du chant et des paroles. Cette expérience m’a permis par analogie de mieux comprendre la possibilité d'aimer l’amour divin à travers le malheur. Il va de soi qu’au cours de ces offices la pensée de la Passion du Christ est entrée en moi une fois pour toutes AD, p. 75. Cette possibilité d'aimer l'amour divin à travers le malheur » constitue une expérience mystique chrétienne authentique. François d’Assise pleurait que l’Amour ne fût pas aimé. À Solesmes, Simone Weil est visitée par une grâce étonnante Il y avait là un jeune Anglais catholique qui m'a donné pour la première fois l'idée d'une vertu surnaturelle des sacrements, par l'éclat véritablement angélique dont il paraissait revêtu après avoir communié. Le hasard – car j'aime toujours mieux dire hasard que Providence – a fait de lui, pour moi, vraiment un messager. Car il m'a fait connaître l'existence de ces poètes anglais du XVIIe siècle qu'on nomme métaphysiques. Plus tard, en les lisant, j'y ai découvert le poème... qui est intitulé Amour. Je l'ai appris par cœur. Souvent, au moment culminant des crises violentes de maux de tête, je me suis exercée à le réciter en y appliquant toute mon attention et en adhérant de toute mon âme à la tendresse qu'il enferme. Je croyais seulement lire un beau poème, mais à mon insu, cette récitation avait la vertu d'une prière. C'est au cours d'une de ces récitations que... le Christ lui-même est descendu et m'a prise... Dans cette soudaine emprise du Christ sur moi, ni les sens ni l'imagination n'ont eu aucune part ; j'ai seulement senti à travers la souffrance la présence d'un amour analogue à celui qu'on lit dans le sourire d'un visage aimé AD, p. 76. Simone Weil récite le poème Love de George Herbert 1593-1633 pour ne pas répandre sa douleur autour d’elle, pour ne pas souiller le monde de sa plainte. Elle le récite en y appliquant toute mon attention », c’est-à-dire en renonçant à la force, en consentant au vide, et c’est ainsi qu’elle lui trouve la vertu d'une prière », et que le Christ lui-même est descendu et m’a prise ». Amour m’a dit d’entrer, mon âme a reculé,Pleine de poussière et de Amour aux yeux vifs, en me voyant faiblirDe plus en plus, le seuil passé,Se rapprocha de moi et doucement s’enquitSi quelque chose me manquait. Un hôte, répondis-je, digne d’être dit Amour, ce sera le sans-cœur, le très ingrat ? Oh mon aimé,Je ne puis pas te regarder !Amour en souriant prit ma main et me dit Qui donc fit tes yeux sinon moi ? Oui, mais j’ai souillé les miens, Seigneur. Que ma fonteS’en aille où elle a sais-tu pas, dit Amour, qui a porté la faute ?Lors, mon aimé, je veux dit Amour, et goûte ma j’ai pris place et mangé. Pour Simone Weil, le paradoxe de cette expérience mystique, pourtant la plus personnelle de toutes les expériences, réside dans le fait qu’elle est fondamentalement la même pour les hommes et les femmes, qu’ils soient grecs ou chrétiens, musulmans ou juifs, en France, en Allemagne comme en Arabie, en Perse ou ailleurs. Le Christ l’a saisie comme il a saisi saint Paul et beaucoup d’autres. Au père Perrin elle avoue qu’elle n’avait jamais pensé qu’un tel contact de personne à personne, ici-bas, entre un être humain et Dieu » fût possible. J’avais vaguement entendu parler de choses de ce genre, mais je n’y avais jamais cru. Dans les Fioretti, les histoires d’apparition me rebutaient plutôt qu’autre chose, comme les miracles dans l’Évangile. » Le Christ lui-même est descendu et m’a prise. » Sans se départir de sa méthode, Simone Weil écarte les soupçons qui pourraient venir à l'esprit de son lecteur. Comment a-t-elle senti cette emprise du Christ sur elle ? Ni les sens, précise-t-elle, ni l'imagination n’ont eu part à cette certitude. Dans le cœur de sa souffrance même, elle a senti la présence de l'amour, amour analogue à celui qu’on lit dans le sourire d'un visage aimé ». Cette intuition n’est pas née de lectures antérieures. Jamais auparavant elle n’avait ouvert la littérature mystique. D'ailleurs, jamais auparavant elle n’en avait eu l'appétit, comme si Dieu avait préservé son intelligence de tout contact avec cette expérience, fût-elle livresque. Se rend-elle immédiatement à cette révélation ? Son amour s’y rend, mais son intelligence s’y refuse. Elle décide alors de chercher ce que cette illumination peut recéler de vérité, avec toute son attention. Elle n’a pas peur de se lancer dans cette enquête. Puisque le Christ est vérité, c’est lui qu'elle trouvera en y accédant. C'est donc vers lui qu’elle reviendra, tout naturellement. Elle rentre de Solesmes avec sa mère, impatiente de s'absorber dans ses investigations. Elle sait où découvrir les indices. Dans les livres. Un travail immense l’attend, mais elle a la foi La foi, c’est l’expérience que l’intelligence est éclairée par l’amour. » De cette expérience elle ne parlera à personne, sinon, in extremis, au père Joseph-Marie Perrin et au poète Joë Bousquet, dans une lettre qu’elle leur adressera à partir de New-York, sachant qu’elle ne les reverra plus. Car elle est extrêmement discrète et pudique en ce qui regarde sa foi. Rien ne lui fait plus horreur qu’une adhésion ostensible à une collectivité, Église ou parti. Elle hésite sur le seuil du baptême, et décidera finalement d’y renoncer pour préserver la liberté de son intimité avec Dieu. Sa foi reste secrète, mais cependant agissante comme levain dans la pâte. Simone Weil cherche inlassablement le rapport entre mystique et politique, entre contemplation et action, entre connaissance surnaturelle et sciences. Le salut serait d’aller au lieu pur où les contraires sont un. » Les heurts entre les différentes cultures ne la découragent pas ; ils attisent son intelligence, excitent sa méthode analogique. Passionnée par les mythes grecs, elle voit par exemple le Christ dans la figure de Prométhée, avec la détermination du temps et de l’espace en moins ». Dans la tragédie d’Antigone de Sophocle, elle voit l’illustration de la parole évangélique Il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes » Ac 4,19 et 5,29. Et l’axiome d’Archimède, Donne-moi un point d’appui et j’ébranlerai le monde » est pour elle une prophétie Le point d’appui est la Croix, intersection du temps et de l’éternité. » Simone Weil remet en question l’opposition traditionnelle entre les mythes des sources grecques et les mystères chrétiens, si bien qu’elle passera pour n’avoir pas vu l’originalité du christianisme cf. Daniélou, Moeller. À ses yeux, il n’y a pas de doute que géométrie grecque et foi chrétienne ont jailli de la même source, puisqu’il y a conciliation entre vérité et justice. La civilisation occidentale souffre d’une scission entre culture et spiritualité et ce n’est qu’en éclairant vivement la relation du christianisme aux autres cultures dites païennes que cette fracture peut être surmontée. Tant que le hiatus demeure entre vie profane et vie spirituelle, le christianisme ne sera pas incarné, il n’imprégnera pas toute la vie profane comme il le doit, il en restera séparé et par suite non agissant ». Il n’y a pas le point de vue chrétien et les autres, mais la vérité et l’erreur. Non pas ce qui n’est pas chrétien est faux, mais tout ce qui est vrai est chrétien. » Il y a des vérités explicites dans les autres religions que la religion chrétienne contient implicitement. Et vice versa, il y a des vérités explicites dans le catholicisme que les autres religions contiennent implicitement. SW se sent chrétienne sans ambiguïté, mais refuse de reconnaître au christianisme une primauté spirituelle dans l’histoire, dans l’espace ou dans le temps. Profondément touchée par la figure du Christ et son message, Simone Weil a manifestement beaucoup de réticence à l’égard de l’institution ecclésiale, en raison notamment de son amour des religions non chrétiennes, et surtout celle de la Grèce antique. Il faut se rappeler ici le regard que portaient alors la plupart des théologiens à leur endroit Hors de l’Église, pas de salut ! » À la lecture de Attente de Dieu et surtout de Lettre à un religieux, on voit qu’elle est à la recherche d’une certitude intellectuelle qui la contraigne à demander le baptême. Mais ses exigences rationnelles freinent une démarche qui semble pourtant très avancée à l’intime du cœur. Elle aime débattre sans répit, avec une impitoyable logique, jusqu’à l’obstination cf. sa correspondance avec le père Joseph-Marie Perrin et le père Couturier. Parfois jusqu’à l’exaltation. Dans sa recherche philosophique, elle a été marquée par le stoïcisme cf. Intuitions pré-chrétiennes. Mais son stoïcisme n’est pas celui de la tradition romaine, marquée par un volontarisme austère, mais bien plutôt celui des Grecs, qui se montre ouvert à un univers religieux. En partant de l’harmonie cachée dans l’ordre de monde, il culmine dans la contemplation du Logos, conçu comme un feu subtil qui pénètre l’univers et l’ordonne. Le stoïcien grec consent » librement à la nécessité » qui préside au déroulement de l’univers, dépasse les contingences apparentes et pénètre ainsi dans le royaume de la beauté parfaite. Son âme, comme une étincelle, s’identifie au feu subtil qui soutient l’ordre apparemment aveugle du monde. Cette doctrine rejoint la mystique néo-pythagoricienne, fascinée par l’harmonie des nombres, qui a fortement marqué Platon. Une tradition voudrait que celui-ci ait fait graver au fronton de l’Académie, l’école qu’il fonda à Athènes Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre ! » Cette tradition est très tardive – postérieure d’au moins dix siècles à Platon – mais conforme dans l'esprit, comme on peut s'en convaincre en relisant ce que disait Platon des sciences propres à la formation du philosophe livre VII de la République, et en particulier du rôle de la géométrie en République, VII, 526c8-527c11, qui sont des préalables destinés à tester et développer la capacité d'abstraction de l'étudiant, c'est-à-dire son aptitude à dépasser le stade des sensations qui nous maintiennent dans l'ordre du visible et du monde matériel pour s'élever jusqu'à l'intelligible pur. Devant les malheurs du monde, Simone Weil se refuse à voir la Providence divine. Comment voir dans la bombe qui épargne ma maison mais qui anéantit l’hôpital voisin une manifestation de la Providence ? Elle préfère parler d’un ordre impersonnel » du monde que de la volonté de Dieu », comme l’enseignait la théologie de l’époque. Pour la même raison elle rejette les miracles, qui seraient des entorses au déroulement nécessaire » de l’univers. La beauté du monde est impersonnelle. Elle assimile l’espérance chrétienne à l’amor fati, dont elle voit la manifestation dans la passion de Jésus, crucifié par un monde aveugle C’est en ce sens qu’elle applique au christianisme la formule ambigüe de religion des esclaves » des esclaves crucifiés par l’aveugle nécessité de la société. Avant la lecture du poème de George Herbert, elle n'avait, comme on l’a dit, jamais lu un seul écrit mystique AD, p. 45. Ce n’est qu’en juin 1941, lors de son séjour chez Gustave Thibon qu’elle découvrira – en grec – les mots du Notre Père. Elle s’engage aussitôt à l’apprendre par cœur, découvrant la douceur infinie de ce texte » qui la saisit tellement qu'elle ne peut s'empêcher de le réciter dès lors presque continuellement. Se bornant à cette unique pratique religieuse, elle s'astreint à recommencer cette récitation jusqu'à ce qu'elle obtienne une attention absolument pure ». Elle connaît alors cet état que les théologiens de la vie spirituelle ont nommé la contemplation acquise » Parfois les premiers mots déjà arrachent ma pensée à mon corps et la transportent en un lieu hors de l'espace d'où il n'y a ni perspective ni point de vue. L'espace s'ouvre. L'infinité de l’espace ordinaire de la perception est remplacée par une infinité à la deuxième ou quelque fois troisième puissance. En même temps, cette infinité d'infinité s'emplit de part et d'autre de silence, un silence qui n'est pas une absence de son, qui est l’objet d’une sensation positive, plus positive que celle d'un son. Les bruits, s'il y en a, ne me parviennent qu'après avoir traversé ce silence AD, p. 48-49. Simone Weil décrit ici ce que les théologiens de la vie spirituelle nomment la nuit des sens », le sommeil des puissances », ou le silence des facultés de surface de l'âme ». Jusque-là son expérience ne dépasse pas la contemplation acquise » ; mais voici qui ressemble au premier degré de la contemplation passive Parfois aussi, pendant cette récitation ou à d'autres moments, le Christ est présent en personne, mais d'une présence infiniment plus réelle, plus poignante, plus claire et plus pleine d'amour que cette première fois où il m'a prise. » AD, p. 49. De 1934 à 1941, Simone Weil est comme saisie par une vraie vie mystique. Sa rencontre avec le Christ, qu'elle s’efforce de rejoindre en participant aux souffrances du monde, marque une étape dans sa vie. Elle sait désormais que quelque chose fait exception à la pesanteur, qu’elle nomme la grâce »… en contraste avec le règne de la force qui s’impose dans le même temps en Europe, tandis que l’Allemagne nazie envahit la France. Le 1er septembre 1939 la Wehrmacht envahit la Pologne, et le 17 c’est au tour de l’Armée rouge, selon le pacte secret germano-soviétique. Le 1er septembre, c’est aussi la mobilisation générale le 2 en Suisse. Le 3 septembre, déclaration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France ainsi que de l’Australie et de la Nouvelle Zélande. Simone Weil rédige Quelques réflexions sur l’origine de l’hitlérisme. Le 10 mai 1940, début de l'opération Fall Gelb, offensive allemande à l'Ouest contre les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la France. C'est aussi le début de la Bataille de France et la fin de la Drôle de guerre. Déclarée ville ouverte dès la débâcle, Paris est occupée par la Wehrmacht le 14 juin 1940. Le 15 juin 1940, Simone Weil est obligée, en raison de ses origines juives, de monter à contrecœur avec ses parents dans le dernier train qui quitte Paris en direction du sud, en zone libre ». Elle s’arrête d’abord à Nevers, puis, en raison de l’arrivée des Allemands, s’échappe en direction de Vichy quelques jours avant que Pétain n’y installe son gouvernement – juste le temps pour elle de s’occuper du sort des prisonniers de guerre coloniaux –, et arrive enfin à Marseille, d’où elle ne songe qu’à s’embarquer pour l’Angleterre afin d’y rejoindre les jeunes forces de la France Libre. Mais à Marseille elle ne demeure pas inactive. Elle écrit dans les Cahiers du Sud, et distribue clandestinement, au risque de sa vie, les Cahiers du Témoignage chrétien, créés pour lutter contre la collaboration avec le nazisme. Elle se préoccupe aussi du sort de travailleurs indochinois regroupés au camp de Mazargues en leur distribuant ses tickets d’alimentation et en intervenant pour eux auprès des autorités. Elle se lie avec René Daumal[1] et Lanza del Vasto, fréquente la Société d’études philosophiques de Marseille animée par Gaston Berger[2] et lit Initiations à la physique de Max Planck. Mais en octobre 1941 elle n’hésite pas à abandonner ses travaux érudits études du Tao te King de Lao-tseu et des Upanishad pour aller travailler comme ouvrière agricole chez l’écrivain-agriculteur Gustave Thibon, puis aux vendanges dans le Gard à Saint-Julien-de-Peyrolas, ce qui fut vite un véritable enfer pour elle, car la tuberculose commençait à la miner Un jour je me demandai si je n'étais pas morte et tombée en enfer sans m’en apercevoir, et si l'enfer ne consistait pas à vendanger éternellement. » La Pesanteur et la Grâce, p. VI. C’est le dominicain Joseph-Marie Perrin qui l’a mise en relation avec Thibon. Elle s’entretient régulièrement avec ce religieux sur les problèmes qui la tiennent à distance de l’Église. En 1942, elle suit la Semaine Sainte à l’abbaye d’En-Calcat, s’y entretient avec Dom Clément Jacob qui la considère comme hérétique. Ses parents la persuadent, difficilement, de quitter la France et de rejoindre son frère André qui l’a précédée à New-York. Le 14 mai, elle embarque pour les USA, via Casablanca. Le voyage dure un mois du 7 juin au 8 juillet durant lequel elle sent douloureusement se creuser l’écart qui la sépare de son pays natal. Consentant à contrecœur à s’exiler aux États-Unis pour mettre ses parents à l’abri de l’antisémitisme, elle fréquente à New-York Jacques Maritain et le père Couturier. Mais elle ne rêve que de rejoindre la Résistance, cherchant à s’y s'engager au plus tôt. Après de multiples démarches – elle écrit à Jacques Soustelle et à Maurice Schumann – elle parvient enfin à embarquer pour Londres pour y rejoindre la France Libre. Le 10 novembre 1942, elle s’embarque sur un bateau suédois en partance pour Liverpool et rejoint le Conseil national de la Résistance. Elle se démène pour obtenir une mission en France occupée, ce qui lui est refusé en raison de son état de santé. Elle est aussi, lui dit-on, trop connue des services allemands. Ce refus est pour elle comme une mort. Elle écrit à un capitaine anglais N’importe quel degré de danger me serait bienvenu si seulement je pouvais faire quelque chose de réellement utile. Ma vie n’a pour moi aucune valeur aussi longtemps que Paris, ma cité natale, est soumise à la domination allemande. » Introduite par des amis dans la Direction de l’Intérieur de la France libre », on lui demande de travailler plutôt sur ce qui pourrait être la future Constitution de la France, une fois libérée. Ce travail inachevé, dans lequel elle investira ses dernières forces, donne naissance à son maître-livre, L’Enracinement, dont le sous-titre éclaire bien le projet Prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain. Car l’homme, à ses yeux, est un être de devoirs – celui d’abord de reconnaître ce qui le lie originellement à ses frères – bien avant d’avoir des droits voir Écrits de Londres. À partir de ce moment, choisissant de se contenter de la ration alimentaire officielle allouée aux Français de France, elle distribue ses tickets de ravitaillement aux plus nécessiteux. Un trait encore elle s’est trouvé une chambrette dans un quartier très pauvre de Londres, Holland Park, chez Mrs Francis qui doit prendre soin de ses deux enfants de 9 et 14 ans. Simone Weil consacre une part de son précieux temps à leur raconter des histoires spécialiste des contes, elle en connaît de merveilleux. Jusqu’à la fin elle reste tourmentée dans sa quête religieuse par la dichotomie, insupportable à ses yeux, entre d’une part sa foi au Christ, jointe à un ardent désir de l’Eucharistie, et d’autre part son impossibilité rationnelle d’accepter certaines positions de l’Église. Elle allait à la messe tous les dimanches et souvent en semaine. Parfois Maurice Schumann l’accompagnait, mais elle le quittait au seuil de l’église parce qu’elle préférait être seule pendant l’office. Quatre mois de désillusions et de privations achèveront de l’épuiser. Exténuée, souffrant de malnutrition, atteinte de tuberculose, elle est retrouvée inconsciente chez elle, un matin, par son amie Simone Deitz. Elle est alors hospitalisée à l’hôpital Middlesex. Sur son lit d’hôpital, elle reprend la lecture de la Gîtâ en sanscrit. En désaccord avec certaines orientations de La France Libre, reprochant au mouvement gaulliste ses prétentions à l’hégémonie, elle démissionne de ses fonctions. Transférée au sanatorium d’Ashford Kent le 17 août, elle s’y éteint le 24 août 1943, à l’âge de 34 ans, d’une défaillance cardiaque. Elle sera enterrée dans la partie du cimetière réservée aux catholiques. Le prêtre qui devait accompagner l’inhumation n’arrivera pas il a manqué son train ! La vie de Simone Weil pourrait se résumer dans cette phrase qu'elle écrivait à G. Thibon Je n'ai jamais pu encore vraiment me résigner à ce que tous les êtres humains autres que moi ne soient pas complètement préservés de toute possibilité de malheur. » PG, p. VII. Dans un document connu sous le nom d’Autobiographie spirituelle elle avait écrit au père Perrin J’ai toujours cru que l’instant de la mort est la norme et le but de la vie. Je pensais que pour ceux qui vivent comme il convient, c’est l’instant où pour une fraction infinitésimale du temps la vérité pure, nue, certaine, éternelle entre dans l’âme. Je peux dire que jamais je n’ai désiré pour moi un autre bien. » Note de l'auteur Cet exposé est nourri des travaux des nombreux auteurs qui se sont penchés sur Simone Weil et auxquels je n'ai pas hésité à emprunter, tout en renonçant ici à en mentionner les références, afin de ne pas en alourdir le propos.» Simone Weil une vie en quête de vérité 1/4Simone Weil une vie en quête de vérité 3/4 [1] Poète, critique, essayiste, indianiste, écrivain et dramaturge, René Daumal 1908-1944 avait rencontré Simone Weil dans la classe d’Alain au Lycée Henri IV. À Marseille, il lui enseigne le sanskrit, dont il avait composé une grammaire. [2] Le père du chorégraphe Maurice Béjart.
SIMONEVEIL La politique au service des femmes Simone Veil, rescapée de l’enfer d’Auschwitz 10h00 , le 5 juillet 2017 Partie dans un convoi de la mort à l’âge de seize ans et demi, Simone Veil a vu sa famille décimée dans les camps. Elle faisait partie des rares rescapés d’Auschwitz et, de son retour jusqu’à ses dernières années, n’a cessé de

Après avoir, en tant qu’artiste invité, fait entrer l’indicible au Panthéon, le cinéaste David Teboul nous donne en partage, à travers un livre minutieusement pensé, le témoignage recueilli au plus près de celle que Jean d’Ormesson décrivait comme une grande dame d’autrefois dont la dignité et l’allure imposaient le respect ». Dans cet ouvrage qui lui ressemble, elle raconte l’enfance niçoise, l’arrestation, la déportation, le difficile retour des camps, l’indifférence, le désir de vivre, les combats politiques et l’immarcescible empreinte du camp. Times of Israël Le livre est le fruit d’une rencontre et d’une amitié improbables, d’une histoire d’amour pudique et d’une promesse… Recevez gratuitement notre édition quotidienne par mail pour ne rien manquer du meilleur de l’info Inscription gratuite ! David Teboul Improbables, en effet, en tout cas au départ, mais je n’aime pas beaucoup l’expression amour pudique » c’est une histoire d’amitié sincère, intime et légère. Légère car étrangement, même si nous parlions beaucoup de la déportation, avec Simone, ce n’était jamais pesant. Simone marquait de la distance face aux choses elle avait vécu et vu tant d’atrocités qu’elle avait une forme de retenue. Avec Simone, ce n’était jamais pesant » Serez-vous alors d’accord avec l’expression livre-voix » dont on est tenté de gratifier le livre, tant il invite à une expérience synesthésique inattendue sollicitant également l’ouïe du lecteur ? David Teboul. Autorisation Complètement. Je suis vidéaste et j’ai voulu donner à entendre Simone Veil. Entendre quelque chose d’intime qui ne passe pas par le filtre de l’écriture. C’est une parole sans artifices. Pour son entrée au Panthéon, j’ai proposé que l’installation soit sonore. Je ne voulais pas que son visage apparaisse à l’intérieur du monument. Je voulais que sa voix soit entendue. Qu’elle le soit aussi à l’extérieur, dans tout le quartier et au-delà, dans les rues périphériques. Elle m’avait dit J’espère que vous ferez quelque chose de tous ces moments que nous avons passés ensemble ». Le livre est la promesse que je lui avais faite. Il est, lui aussi, conçu pour être entendu. Ce n’est ni un livre de commentateur ni un essai sur Simone Veil. C’est un livre à la première personne dont je suis le déclencheur, celui qui a enregistré la voix, tenté de la faire partager et maintenant, de la faire lire. L’écriture instaure une distance. Ce récit l’abolit. La tradition juive rappelle le nom d’un disparu pour honorer sa mémoire. Le livre est dédié à Albert Bulka, le plus jeune des enfants d’Izieu.… Simone Veil n’a jamais accepté la façon dont les nazis ont, jusqu’à la fin, déporté des enfants tout en sachant pertinemment que pour eux, la guerre était perdue. Le statut des enfants dans les camps l’a toujours particulièrement choquée. Elle m’en parlait souvent. Le convoi 71 avait à son bord cinq cents personnes, dont Simone Jacob, sa mère Yvonne, sa sœur Madeleine et trente-quatre des enfants raflés à la Maison d’Izieu. Albert Bulka avait quatre ans. Il a été assassiné dès son arrivée à Auschwitz. Le processus d’extermination a produit tant d’indifférenciation qu’il m’a paru important de l’incarner dans ce livre à travers le nom de cet enfant. À quoi pouvait-on penser quand on avait dix-sept ans, et que l’on se réveillait dans le camp à l’aube ? » Pourquoi avoir doté le titre de votre livre du doux et rimbaldien aube » ? Rimbaud parle en effet des camps de l’ombre » ndlr Aube, 23e poème des Illuminations mais ce n’est pas ma référence. Elle est ailleurs, dans une question que je n’ai jamais posée à Simone Veil. J’en ai pris conscience alors qu’elle était moins présente et qu’il était trop tard. À quoi pouvait-on penser quand on avait dix-sept ans et que l’on se réveillait dans le camp à l’aube ? C’est dur, la nuit, dans le camp. C’est l’angoisse de la mort, les cauchemars, les rêves. Et le matin ? En tant qu’artiste invité au Panthéon, l’idée m’est immédiatement venue de proposer que toute la cérémonie repose sur l’aube, sans que je puisse vraiment savoir pourquoi. Simone Veil, l’aube à Birkenau »,par David Teboul, aux éditions Les arènes, 288 pages, 20 € Peut-être parce que l’aube est aussi une promesse, pour reprendre les mots de Romain Gary que j’aime beaucoup. Pour tenter de transmettre l’indicible, j’ai refusé les images dont nous sommes submergés. J’ai voulu que cette mémoire, tous ces corps d’hommes, de femmes et d’enfants, entrent au Panthéon et que le son de l’aube à Birkenau pénètre les murs de ce monument de la République. J’en ai fait la minute de silence. Birkenau, juin 2018, cinq heures du matin une aube que le chant des oiseaux rend encore plus angoissante. Quand le président Macron est entré, accompagné des membres du gouvernement, de la famille et des enfants, les portes du Panthéon se sont refermées et à l’intérieur, chacun a pu écouter la nuit à Birkenau. Les portes se sont ensuite ouvertes et ce son est allé jusqu’au Jardin du Luxembourg. Simone Veil était présente dans tout le quartier grâce aux micros qui diffusaient sa voix. Le son a introduit le sentiment de sérénité que je voulais insuffler à cet hommage. pages de l’ouvrage, confiées à un graphiste réputé Bruno Monguzzi, ont été pensées, apprend-t-on, ligne à ligne ». Pourquoi une attention si scrupuleuse a-t-elle été accordée à la forme ? Je voulais un bel objet, pas un beau livre. On ne lit jamais les beaux livres, on les ouvre une fois et on les range dans la bibliothèque. Je voulais qu’on puisse le lire facilement. Simone Veil n’était pas une intellectuelle, elle parlait très simplement. Il fallait un livre léger, qui ne soit pas dans le sacré. Un bel objet, pas un beau livre. On ne lit jamais les beaux livres » Elle n’était pas dans la sacralisation des choses. Il était primordial pour moi de travailler avec un graphiste capable de comprendre le lien entre le son, la voix et les photographies présentes dans le livre, afin de donner une forme à cet ensemble. Il ne fallait surtout pas être dans le fétichisme du livre. Je n’aime pas quand on est chichiteux » avec la Shoah, fût-ce pour de bonnes raisons. Le livre devait ressembler à Simone Veil qui était belle à l’intérieur et à l’extérieur. Il devait aussi ressembler à la promesse que je lui avais faite et à l’intimité de notre lien qui est certainement l’un des plus beaux que j’aie eu la chance de vivre. Des photos d’époques différentes illustrent ce livre dont l’une, prise par vous-même pendant vos rencontres, capte le regard de Simone Veil. Dans Simone Veil et les siens Grasset 2018, la journaliste Annick Cojean décrit des yeux exigeants et lucides, qui avaient vu tant de choses, et dans lesquels passaient parfois des nuages et des ombres qu’elle chassait »… Simone avait un regard très puissant. La première fois que je l’ai vue, c’était en 1979, à la télévision, lors de la diffusion des Dossiers de l’Écran » émission de télévision française créée par feu Armand Jammot, dont le thème était, ce mardi 6 mars 1979 Vie et mort dans les camps nazis ». Le regard de Simone Veil photographié par David Teboul. Autorisation Simone Veil, qui participait au débat, entra ce soir-là dans votre Panthéon personnel. Prélude de votre future rencontre, cette émission ne fut-elle pas également à l’origine de votre vocation d’artiste vidéaste et cinéaste ? C’est un moment magnifique où il y a ce zoom progressif sur son visage. Quelque chose se produit, en plus de l’émotion suscitée par la diffusion d’une série dont les quatre épisodes m’avaient fait pleurer ndlr, Holocauste. C’est un choc cinématographique, émotionnel et érotique. Simone Veil est belle, singulière et elle parle avec une grande liberté de sa déportation. L’enfant que je suis alors saisit quelque chose. Par la suite, Simone Veil ne m’a plus jamais quitté. Cette émission n’a-t-elle pas eu aussi pour conséquence d’interpeller votre judéité ? Dans ces années-là, personne autour de moi n’exprimait sa judéité. À Kippour, on invoquait une maladie pour justifier mon absence. D’ailleurs, à l’école, il était impensable pour moi de dire que j’étais juif. Et quand, ce soir-là, je vois cette femme sublime, de surcroît ministre, parler à la télévision de sa déportation en tant que juive, je bascule… Il vous a fallu attendre la fin des années 1990 pour, jeune cinéaste, lui proposer de lui consacrer un film et obtenir finalement son accord grâce à un argument inattendu. Quelle chutspa s’est-elle donc emparée du jeune artiste subjugué ? Simone me touchait profondément. Je l’ai toujours aimée, avant même de la connaître mais elle ne m’impressionnait pas. Il est plus facile de nouer des liens quand on n’est pas impressionné. Elle m’avait plusieurs fois fait transmettre son refus par son secrétariat. Le jour où elle prend elle-même le téléphone, elle me parle très sèchement. Cela a d’ailleurs été la seule fois où elle a été sèche avec moi. Pourtant, à ce moment-là, je suis convaincu que je vais réussir. Votre chignon, madame » Elle me donne rendez-vous le lendemain à son bureau. Elle arrive très en retard et se confond en excuses, ce qui me plaît bien ! On parle de plein de choses et, fidèle à son sens de la formule, elle me demande soudain qu’est-ce-qui vous intéresse chez moi ? ». Votre chignon, madame ». Dès lors, je redeviens certainement l’enfant qui l’avait regardée aux Dossiers de l’Ecran » et elle redevient la jeune déportée Simone Jacob. Elle me parle de maman, de papa, de ses quinze ans. Très vite, malgré notre différence d’âge et son statut, nous entamons une relation très jeune. J’ai toujours eu le sentiment que c’était la rescapée qui s’exprimait, même quand elle me parlait de l’après-guerre ou que je l’interrogeais sur son combat pour l’amélioration des droits des femmes. Je crois que c’est ce lien à la jeunesse qui nous a unis pendant toute la durée de nos conversations. Ce chignon a fait l’objet d’une séquence devenue culte, dans l’émission de Christophe Dechavanne ndlr Toutes folles de lui », 1986 dans laquelle Simone Veil dénoue ses cheveux. L’animateur nous a confié que le mari de Simone Veil, Antoine, n’avait pas du tout apprécié l’apparition télévisuelle de son épouse en cheveux »… Moi, je l’ai filmée chez son coiffeur et Antoine n’était pas très content ! Il était plus conventionnel que Simone… La raison pour laquelle votre réponse a ébranlé Simone Veil s’explique par le fait qu’aucune femme de son convoi n’avait été complètement rasée… On n’a jamais su pourquoi ces femmes n’avaient pas été totalement rasées. S’il y a eu des survivants, c’est sans doute parce que le typhus a ralenti le zèle de l’administration nazie à l’arrivée du convoi. C’est une chance comme il y en a eu, parfois, au camp. C’est un accident. Les survivants sont des accidents. Peut-être ont-ils été plus solides que d’autres, mais ils sont des accidents. De quelle façon meniez-vous les interviews ? S’agissait-il de conversations à bâtons rompus ? Oui et il nous arrivait aussi de nous contenter de déjeuner, comme les deux amis que nous étions devenus. D’autres fois, je reposais des questions laissées en suspens. Pratiquait-elle une forme de censure ? Non, jamais. Simone Veil demandait-elle à relire vos retranscriptions, comme le font souvent les politiques ? Non, mais elle avait vu mon film ndlr Simone Veil, une histoire française » 2004. Elle me connaissait bien et m’accordait sa confiance. La mère de Simone Veil, Yvonne Jacob à La Ciotat avant la déportation. Autorisation Elle vous raconte son enfance à Nice, l’arrestation, la déportation, le difficile retour des camps, les engagements politiques… Le fil rouge qui relie ces deux parties de sa vie n’est-il pas incarné par sa mère ? C’est fondamental. C’est dans le souvenir de sa mère que Simone Veil a puisé le courage qui n’a cessé de l’animer par la suite. Elle me parlait souvent de la force que sa mère lui avait donnée. C’était un amour passionnel que l’épreuve de la déportation a renforcé et doublé d’une immense admiration. Au camp, la beauté préservée de Simone Veil, dont la chevelure avait été épargnée par le rasoir erratique des kapos, aurait pu susciter de dangereuses jalousies. Or sa beauté l’a aidée, voire sauvée. Etait-elle, à ce moment de sa jeune vie, une incarnation de l’aube à Birkenau ? Comme elle le dit, à son arrivée au camp, Simone avait gardé l’apparence de sa vie niçoise encore proche. La plupart des femmes étaient au camp depuis très longtemps. Les chefs de block, quand elles étaient juives, venaient de l’Est et avaient déjà perdu toute leur famille. Elles étaient redoutables. Alors oui, dans ce non-lieu hors du monde qu’était le camp, je pense que la jeunesse et la beauté ont réveillé, chez certaines, le peu d’humanité qui leur restait. C’est cette perte d’humanité que Ginette Kolinka, camarade de déportation, décèle dans les propos brutaux des kapos que Simone Veil vous rapporte, à l’identique Bah, ceux qui étaient avec vous…, regardez la cheminée, ils sont déjà partis, ils ont été gazés, brûlés. Cette fumée, voilà ce qu’il reste d’eux. » Selon elle, le message de ces gardiennes déportées était dépourvu de cynisme Elles estimaient qu’il valait mieux ne pas se faire d’illusions ». Plus tard, Simone Veil vous dit Dès 1945, je suis devenue, je ne dirais pas cynique mais absolument sans illusions ». Elle reprend les deux mots. Est-ce ça, l’empreinte instinctive, ce quelque chose de sensoriel, d’ineffaçable » qui fait d’elle, selon les mots de Marceline Loridan-Ivens, une fille du camp » ? Oui et c’est la raison pour laquelle Simone Veil était très peu sensible aux idéologies et aux positions extrêmes dont elle se méfiait elle n’avait pas d’illusions sur les choses mais elle n’était pas cynique. Je vous parlais, au début de notre entretien, de la distance qu’elle avait face aux choses. Dans le camp, elle avait été témoin de ce que les hommes avaient été capables de faire. Elle en était restée marquée et toute sa vie, elle est restée une déportée. Ses réactions, épidermiques, étaient liées à ce qu’elle avait vécu. Elle l’exprime très bien dans le livre. Si la victoire éclatante de Boris Johnson acte le Brexit, elle signe aussi la défaite de Jeremy Corbyn, leader politique le plus populaire parmi les Britanniques ayant, selon un rapport publié récemment, des opinions antisémites suscitant dans la foulée les accusations de Jean-Luc Mélanchon à l’encontre du CRIF. Ce soubresaut européen n’apparaît-il pas comme une ironie du sort, voire de l’Histoire, au regard de l’engagement de Simone Veil qui a tant œuvré pour la construction européenne ? Le contexte européen dans lequel Simone Veil intervenait quand elle était en activité était très différent. Je ne peux pas commenter une situation actuelle en son nom et il m’est difficile de faire des liens avec l’actualité. Je n’aime pas voir quelqu’un d’autre se livrer à ce genre d’exercice. Je m’interdis de faire des comparaisons, même si je perçois évidemment certains échos. Et puis, Simone Veil était imprévisible sur les idéologies extrêmes, son raisonnement était facile à deviner mais sur des sujets plus nuancés, elle était très singulière et avait des points de vue parfois surprenants.… Sans verser dans la prosopopée, s’agissant de la réconciliation franco-allemande dont elle fut l’une des promotrices, ne retrouvez-vous pas, dans la récente visite d’Angela Merkel à Auschwitz, l’écho de ce que Simone Veil vous disait au sujet de la mémoire Là-dessus, les Allemands ont vraiment joué le jeu » ? C’est un sujet qui lui tenait à cœur. Bien sûr, les Allemands ont joué le jeu. Ils ne pouvaient pas faire autrement pour retrouver une place parmi les nations et s’inscrire dans la construction de l’Europe. Mais c’est vrai ils ont fait un travail très important aux yeux de Simone Veil en matière d’enseignement dans les écoles. Pour tenir une autre promesse, vous donnez la parole à un camarade de déportation, Paul Shaffer, que Simone Jacob avait rencontré à Bobrek. Elle lui dit, dans le livre Lorsque les jeunes disent qu’ils imaginent, ils n’imaginent’ rien du tout. Cela reste inimaginable », Paul répond À mon sens, il est heureux qu’ils ne puissent pas l’imaginer, parce que les individus qui seraient capables de se représenter une telle réalité seraient des individus dangereux ». Ne trouve-t-il pas là une façon à la fois simple et puissante d’évoquer l’indicible ? C’est une phrase extraordinaire. Ce qui s’est passé dans les camps est tellement barbare et obscène…. Simone disait souvent Les gens ne comprennent pas parce qu’ils veulent faire des comparaisons »… Simone Veil et Paul Schaffer, tous deux rescapés du petit camps de Bobrek oùils se sont rencontrés en 1944. Autorisation Simone Veil, une femme française, élégante, digne, indépendante, libre, parfois rigide et, de façon irréductible, une femme juive, comme en témoigne la phrase ultime du livre Le Kaddish sera lu sur ma tombe »… Une femme profondément juive. Et française. C’est par ce texte de Simone Veil, retranscrit dans le livre, que j’ai souhaité faire commencer la cérémonie du Panthéon. Je l’avais enregistrée. C’était important. Le Kaddish sera lu sur ma tombe Quel était le rapport de Simone Veil à Israël ? Elle le dit très clairement c’est par rapport au camp. Les apatrides, des jeunes femmes d’origine polonaise, tchèque ou slovaque disaient Si on s’en sort, on ira en Palestine ». Chaque fois qu’elle était en Israël où elle avait beaucoup d’amis, ce souvenir et cette émotion remontaient. Je trouve qu’elle en parle très bien dans le livre, notamment lorsqu’elle raconte comment ces gens qui avaient tout perdu, y compris leur nationalité, sont partis au moment de la guerre de 1948 et ont trouvé en Israël ce qu’ils cherchaient. Simone Veil me parlait souvent de ce que ce rêve avait représenté pour les survivants. La force de son lien à Israël tenait aussi à cette histoire-là. Votre actualité est aussi cinématographique et liée à Freud… Il s’agit de Sigmund Freud, un juif sans Dieu ». À partir de sa correspondance, mon film dresse un portrait des Freud et décrit la relation particulière que Freud avait avec sa fille, ainsi que sa relation à son propre père et à la figure de Moïse. Il sera diffusé sur Arte. Et je suis très heureux d’aller le présenter à Jérusalem, à l’occasion du Jerusalem Jewish film Festival ! Et le film sur la Sibérie ? C’est Mon amour », qui va prochainement sortir en salles. C’est un film sur l’amour et le désespoir, au bord du fleuve Amour, même si en russe, Amour est un nom propre qui n’a rien à voir avec l’amour. Au risque de vous entraîner dans un résumé forcément réducteur, la tentation est grande de vous demander ce que vous retenez de Simone Veil… Simone Veil était une femme d’un courage et d’une force exceptionnels. Je retiens aussi l’attention qu’elle accordait aux questions humaines, sa réserve sur les populismes et les idéologies. Pour elle, la mémoire était une question très importante, ainsi que la reconnaissance des Justes. Elle avait à cœur de rendre hommage à celles et ceux qui avaient pris des risques. Simone Veil était très sensible à cette résistance qui a sauvé des hommes, des femmes et des enfants juifs. David Teboul, Simone Veil, l’aube à Birkenau, Les arènes, 288 pages, 20 €

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poème il restera de toi simone veil